
Côte d’Ivoire : Election présidentielle 2025/ Vers une crise postélectorale 2010 Bis ?
Tous les éléments sont réunis : une opposition marginalisée ou écartée, une Commission électorale indépendante en perte de crédibilité, des figures politiques majeures rendues inéligibles, des tensions ethniques et identitaires ravivées, et une polarisation à son comble. En somme, les mêmes causes risquent de produire les mêmes effets. La Côte d’Ivoire semble engagée sur la voie d’un remake de 2010.
À l’approche de l’élection présidentielle d’octobre 2025, Rien ne rassure. Le climat politique se tend dangereusement, et ravive les souvenirs douloureux de la crise postélectorale de 2010. De nombreux signaux laissent craindre une répétition de ce scénario, alors que le processus électoral semble déjà miné par des tensions croissantes et un manque de consensus national.
Le récent retrait des principaux partis de l’opposition de la Commission Électorale Indépendante (CEI) constitue l’un des premiers signes de rupture. Cette décision, motivée par des accusations de partialité et de manque de transparence, remet sérieusement en cause la crédibilité de l’institution chargée d’organiser le scrutin. Sans la participation de tous les acteurs politiques, la légitimité du processus électoral risque d’être fortement contestée.
Par ailleurs, plusieurs figures emblématiques de l’opposition ne figurent pas sur la liste électorale. L’absence de l’ancien président Laurent Gbagbo, de Charles Blé Goudé ‘Président du Congrès panafricain pour la justice et l’égalité des peuples (COJEP), et de Guillaume Soro, ancien Premier ministre et ex-président de l’Assemblée nationale, suscite un malaise profond au sein de l’opinion publique. Beaucoup y voient une volonté de neutraliser des adversaires politiques redoutés, au détriment du droit de participation et de la démocratie.
À cela s’ajoutent des discours aux accents belliqueux, de plus en plus clivants, tenus par les principaux leaders politiques. La rhétorique guerrière gagne du terrain, enflamme les médias et embrase les réseaux sociaux. Ces discours créent un climat de confrontation permanente. Cette escalade verbale même sur les plateaux télé fait réfléchir plus d’un sur l’avenir de ce beau pays.
Autre sujet sensible : la controverse autour de la nationalité du président du PDCI-RDA. Certains discours soulèvent des doutes quant à la nationalité « ivoirienne exclusive » de Tidjane Thiam, potentiel candidat à la présidentielle. Ce débat rappelle les heures sombres de la théorie de l’ivoirité, qui avait profondément divisé le pays dans les années 1990 et 2000, et dont les séquelles sont encore visibles.
Face à ces éléments, de nombreux Ivoiriens redoutent une nouvelle crise politique. Pourtant, cette issue n’est pas inéluctable. Le retour à un dialogue politique sincère, l’inclusivité dans la gestion du processus électoral, et l’implication des institutions sous-régionales et internationales sont des pistes essentielles pour prévenir une escalade. La Côte d’Ivoire a déjà payé le prix fort de l’instabilité. Elle ne peut se permettre de retomber dans le chaos.
A. Beugré